La gestion collective consiste à mutualiser l’argent de plusieurs investisseurs pour l’investir sur les mêmes actifs. Elle peut prendre plusieurs formes juridiques : FCP, SICAV

Quels sont les avantages de la gestion collective ?

✅ La gestion collective a principalement deux avantages :

  • Diminution des coûts : la gestion de fonds implique de nombreux frais fixes. En augmentant le volume géré, les frais diminuent en pourcentage.
  • Taille critique : pour intervenir efficacement sur certains marchés, il faut un minimum de capitaux. En regroupant les fonds de nombreux petits investisseurs, le gérant peut mettre en œuvre des stratégies qui seraient impossibles à mettre en œuvre, ou non rentables, pour un seul d’entre eux.

Principe d’équité des investisseurs

En gestion collective, les différents investisseurs possèdent en commun des actifs financiers. Il est important que la performance de ces actifs financiers leur soit attribuée de façon équitable.
Chacun doit recevoir des gains en proportion des montants qu’il a investis. Et la performance obtenue doit être celle de la période d’investissement.
Il faut donc trouver un système qui permette d’évaluer de façon précise ce que possède chaque investisseur sans que l’un soit avantagé par rapport à l’autre.

Cas simple : investissement simultané

Voici un cas simple :

EXEMPLE 1

3 investisseurs créent un fonds mutuel qu’ils donnent à gérer à un professionnel.
Le premier met 2000€, le deuxième 3000€, le troisième 5000€.
Ils investissent cet argent le même jour, et confient donc 10000€ à un gérant.
Ce gérant va placer cet argent sur les marchés financiers, et régulièrement prélever un certain pourcentage de la somme gérée pour se rémunérer.
Au bout de quelques années, les 3 investisseurs décident de récupérer leur argent.

Le gérant liquide le fonds : il revend les actifs détenus par les 3 investisseurs, il rembourse les dettes qu’il a contractées en leur nom, et il prélève les derniers frais de gestion.
Il constate qu’il reste 15000 €.
Il rembourse les investisseurs au prorata de leur mise de départ. Respectivement 3000€, 4500€, et 7500€.

On applique pour cela le principe d’équité des porteurs de part : on rembourse chacun en fonction du pourcentage d’actifs apportés initialement (20%, 30% et 50%).
Où l’on applique à chaque investisseur la performance des actifs du fond sur la période : 50% (de 10000 à 15000€)

Tout cela fonctionne bien car tout le monde place et retire son argent en même temps.

Placements échelonnés dans le temps

EXEMPLE 2

Un fonds mutuel est créé le 1/1/2007.
Le 1/1/2007, l’investisseur A place 1000€
Le 1/10/2007, l’investisseur B place 2000€
Le 1/1/2008, les 2 investisseurs veulent retirer leur argent.

Le gérant liquide le fonds (revente des actifs, remboursement des dettes, prélèvement des frais).
Il trouve 3300€. Que doit-il rembourser à chacun ?
La réponse qui pourrait venir à l’esprit, suite à l’exemple précédent est : 1100€ et 2200€
Chacun aurait alors gagné 10%.

Mais il est clair que cette répartition ne respecte pas le principe d’équité des investisseurs. En effet, B est arrivé beaucoup plus tard que A.
Supposons que l’augmentation de l’actif ait été régulièrement répartie au cours de l’année. On s’attend à ce que B qui est rentré dans le fond à la fin gagne moins, en proportion, que A qui est resté un an.

Inversement, si l’on s’aperçoit que le gérant a perdu de l’argent pendant les 9 premiers mois, et en a gagné beaucoup dans les 3 derniers, on peut s’attendre à ce que B gagne plus, en proportion, que A.

💡 Comment traiter cette situation ?

Actif net

Le seul moyen équitable de rembourser A et B est de faire un bilan du fond, juste avant l’arrivée de B.
On se pose la question : « Quelle serait la valeur du fond si on le liquidait maintenant ? »

Tout se passe comme si à chaque entrée ou sortie du fond on liquidait le fond, et on le recréait1.
On fait le bilan des actifs du fonds, on soustrait les dettes, et les frais de gestion.
On obtient l’actif net du fonds. Sur la base de cet actif net, on détermine ce que possèdent A et B après l’arrivée de B.

Suite de l’exemple 2

Supposons que l’actif net du fonds vaut 1100€ juste avant l’arrivée de B.
On considère qu’après l’arrivée de B tout se passe comme si on avait un nouveau fonds où A mettait 1100€ et B 2000€, avec respectivement 35.5% et 65,5% des actifs.
A la fin, A récupère donc 35.5% de 3300, soit 1170,97 et B récupère 65,5% soit 2129,03

On peut vérifier que ce raisonnement est équitable en étudiant la performance de deux points de vue :

Si on raisonne en performance du fonds :
Pendant les 9 premiers mois de l’année, le fonds a gagné : 10% (de 1000 à 1100)
Pendant les 3 derniers mois, le fonds a gagné 6.452% (de 3100 à 3300)
La performance cumulée est de (1+10%)*(1+6.452%)-1=17.10%.

Si l’on voit la performance du point de vue de chaque client
A a gagné 17.10% (de 1000 à 1170.97), ce qui est bien la performance globale du fonds sur l’année.
B a gagné 6.45% (de 2000 à 2129.03), ce qui est bien la performance du fonds dans la période où il a investi.

Les deux clients ont donc bénéficié tous les deux de la performance du fonds sur leur période d’investissement.

Voici un tableau qui donne les performances des deux investisseurs en fonction de l’actif net au 1/10/2007 :

Actif net au 1/10/07Part de A à la finPart de B à la finPerfo. les 9 premiers moisPerfo. les 3 derniers moisPerfo. totale du fondsPerfo. de APerfo. de B
900,001024,142275,86-10,000%13,793%2,414%2,414%13,793%
1000,001100,002200,000,000%10,000%10,000%10,000%10,000%
1050,001136,072163,935,000%8,197%13,607%13,607%8,197%
1100,001170,972129,0310,000%6,452%17,097%17,097%6,452%
1300,001300,002000,0030,000%0,000%30,000%30,000%0,000%
1400,001358,821941,1840,000%-2,941%35,882%35,882%-2,941%

On voit clairement que l’information sur la valeur des actifs en début et fin d’année ne suffit pas à déterminer les avoirs de chacun des participants, et que la valeur des actifs avant l’entrée de B est déterminante.

Prenons un cas plus général

On a un fonds mutuel où des investisseurs rentrent et sortent à période régulière.

On a deux méthodes, rigoureusement équivalentes, pour calculer les actifs de chacun de façon à assurer l’équité des investisseurs:
En pourcentage : Après chaque mouvement (entrée ou sortie d’argent), on fait un état du pourcentage d’actifs détenu par chacun. Entre deux mouvements, ce pourcentage ne bouge pas. Avant un nouveau mouvement, on calcule l’actif net, et on attribue à chaque investisseur, le même pourcentage qu’au début de la période.
En performance : Après chaque mouvement, on calcule le montant détenu par chaque investisseur. Avant un nouveau mouvement, on calcule la performance des actifs sur la période. Et on applique cette performance au montant détenu par chacun.

EXEMPLE 3

Le 01/01/2008, A et B créent un autre fonds. Ils y mettent respectivement 2000€ et 8000€.
Le 01/06/2008, C ajoute 5000€.
Le 1/11/2008, B retire son argent.

Que se passe-t-il ?

Le 01/01/2008, le gérant note que :

  • L’actif net est de 10000€
  • A et B possèdent respectivement 20% et 80% de cet actif net.

Le 01/06/2008, C ajoute 5000€.
Avant d’intégrer cet argent dans le fonds, le gérant calcule le nouvel actif net : 11000€, ce qui constitue une performance de 10%.

Le gérant peut calculer la part de A de deux manières différentes :

  • En pourcentage : il possède 20% de l’actif net, soit 2200€
  • En performance : il a gagné 10% sur ses 2000€ initiaux, soit 2200€ en tout.

De même B possède 8800€.

Après l’arrivée de C, l’actif net est de 16000€.
On note que A en possède 13.75%, B 55% et C 31,25%

Le 1/11/2008, B retire son argent.
Avant de le lui donner, le gérant calcul l’actif net, qui est de 15000€ (performance : -6.25%).
Et, il calcule la part de chacun :

A possède :

  • En pourcentage : 13.75% de 15000€ soit 2062.50€
  • En performance : 2200€ moins 6.25%, soit 2062.50€

De la même manière :

  • B possède 8250.00€
  • C possède 4687.50€

Le gérant revendra probablement une partie des actifs pour rendre l’argent à B.
Après retrait des 8250€, l’actif net du fonds est de 6750€, dont A possède 30.56%, et C 69.44%.

 ABCActif net
Actif%Actif%Actif%ActifGain
1/1/08
Avant entrée
0€ 0€  0%0€ 
1/1/08
Après entrée
2000€20%8000€80% 0%10000€ 
1/6/08
Avant entrée
2200€20%8800€80% 0%11000€10%
1/6/08
Après entrée
2200€13,750%8800€55%5000€31,250%16000€ 
1/11/08
Avant sortie
2062,50€13,750%8250€55%4687,50€31,250%15000€-6,25%
1/11/08
Après sortie
2062,50€30,556%0€0%4687,50€69,444%6750€ 

Les parts de fonds

Ce système fonctionne bien quand les investisseurs sont peu nombreux et les mouvements rares.
Mais si le fonds a des mouvements quotidiens et des milliers d’investisseurs, il devient impossible pour chacun de connaître sa situation.

Si on travaille en performance, chacun se voit communiquer à chaque mouvement la performance globale du fonds, et doit l’appliquer à ses actifs.
Si on travaille en pourcentage, chacun doit connaître à chaque entrée ou sortie, quel est le pourcentage d’actif qu’il détient.

Ces deux systèmes sont très lourds à suivre pour les investisseurs, mais également pour le gérant.

Pour cela, au lieu d’attribuer à chaque investisseur un pourcentage de l’actif global, pourcentage qui change à chaque entrée ou sortie, ou un montant d’actif qui change quotidiennement, on divise le fonds en « parts de fonds » de taille égale.

Quand un investisseur met de l’argent dans le fonds, on crée des parts nouvelles du même montant que les parts existantes. Quand un investisseur retire son argent, on détruit les parts correspondantes.

À chaque entrée ou sortie d’investisseur, on calcule le montant de la part. L’investisseur connaît ainsi :

  • Son nombre de parts. Ce nombre ne varie que quand il rajoute ou retire de l’argent du fonds
  • La valeur de la part : celle-ci est publiée régulièrement et est identique pour tous les investisseurs
  • Il peut facilement donc facilement déduire le montant de ses avoirs : nombre de parts multipliées par valeur de la part.

Reprenons l’exemple 3.
À la création du fonds, le gérant peut arbitrairement décider qu’à l’ouverture, les parts valent 100€.
Le 01/01/2008, A et B achètent respectivement 20 parts et 80 parts.
Le 01/06/2008, le gérant publie la valeur de la part avant intervention de C.
Deux méthodes :

  • L’actif net a augmenté de 10%, donc la part aussi : 110€
  • L’actif net vaut 11000€, divisé par 100 parts : 110€

On considère donc que C achète 5000€ de parts, soit 45.4545 parts2.

A et B peuvent être informés de la nouvelle valeur de la part, mais n’ont pas besoin de savoir qu’un nouvel acteur est intervenu.

Le 1/11/2008, B retire son argent.
Le gérant calcule un actif net 15000€, et une performance de -6.25%.
Il calcule la valeur de la part :

  • L’actif net a baissé de 6.25%, donc la part aussi : 103,125€
  • L’actif net vaut 1500€, divisé par 145.4545 parts : 103.125€

Il publie cette valeur, et B peut en déduire qu’il possède : 103.125*80=8250€

 ABCActif
ActifNb PartsActifNb PartsActifNb PartActif netNb PartsValeurGain
1/1/08
Avant entrée
0€00€0 00€0100 
1/1/08
Après entrée
2000€208000€80 010000€100100 
1/6/08
Avant entrée
2200€208800€80 011000€10011010%
1/6/08
Après entrée
2200€208800€805000€45,4516000€145,45110 
1/11/08
Avant sortie
2062,50€208250€804687,50€45,4515000€145,45103,13-6,25%
1/11/08
Après sortie
2062,50€200€04687,50€45,456750€65,45103,13 

La valeur liquidative

La valeur de la part ainsi calculée s’appelle la « Valeur liquidative » (VL), ou en anglais la « Net Asset Value » (NAV). Elle correspond à la valeur que récupérerait chaque investisseur si le fonds était liquidé immédiatement3. En publiant régulièrement la VL, le gérant permet à chaque participant de connaître l’état de ses actifs sans connaître les mouvements des autres participants.

🧮 La VL est l’actif net divisé par le nombre de parts. L’actif net est la somme de la valeur des actifs, moins la somme des valeurs des dettes, moins les frais non encore perçus par le gérant.

VL = (Valeur des actifs – Valeur des dettes – Frais non prélevés) / Nombre de parts

➡️ En pratique, 3 acteurs participent au calcul de la VL :

  • Le dépositaire qui est garant de la position du fond. Il connaît la quantité de chaque actif du fonds à une date donnée.
  • Le valorisateur qui attribue une valeur à ces actifs.
  • Le gérant qui in fine valide la VL calculée par le valorisateur.

Pour les raisons exposées ci-dessus, il est important de calculer la VL à chaque mouvement.
Pour de nombreux fonds grand public, les mouvements sont potentiellement quotidiens, et donc, une VL quotidienne est systématiquement publiée.
Pour certains hedgefunds, les investisseurs peuvent rentrer ou sortir une fois par semaine, par mois ou par trimestre. Dans ce cas la VL n’est calculée qu’à cette fréquence.

Parts de fonds et actions

La situation financière d’un fonds ressemble à celle d’une société. Les actifs détenus par une société proviennent de trois sources (passif) :

  • Argent investi par les actionnaires
  • Emprunts
  • Bénéfices non redistribués

Et les actifs détenus par un fonds proviennent également de trois sources :

  • Argent placé par les détenteurs de part
  • Emprunts
  • Gains précédents non distribués

💡 À ces trois sources, il faut également retirer les frais prélevés pour la gestion du fonds.

La différence entre une société et un fonds est d’une part la motivation : généralement une société tire ses bénéfices d’une activité de production de bien ou de services, alors que la vocation d’un fonds est d’investir l’argent dans d’autres actifs financiers.

Mais elle est également due à la structure du passif. Le nombre d’actions émises par une entreprise est stable dans le temps. Leur nombre varie du fait d’actions ponctuelles entreprises par la société : émission, rachat, exercice de stock-options, etc…
Mais les investisseurs qui achètent et vendent des actions le font généralement sur un marché secondaire vis-à-vis d’autres investisseurs.  L’achat ou la vente d’actions ne modifie pas le nombre d’actions.
Le prix de l’action est déterminé par les évaluations des acteurs du marché, et non pas directement par la valeur nette des actifs de la société.

Généralement, dans un fonds, quand un investisseur rentre dans le fonds, le nombre de parts augmente. Quand il se retire, le nombre de parts diminue. Et le prix de la part est la résultante de la valeur nette des actifs.
C’est pourquoi l’arrivée d’argent dans un fonds ne s’appelle pas, sauf par abus de langage, un « achat de part » mais une souscription. Le retrait de d’argent ne s’appelle pas une « vente de part », mais un rachat (rachat des parts par le fonds qui les a émises).

Ces deux différences se retrouvent dans le terme « SICAV » : Société d’Investissement à CApital Variable. Il s’agit d’une société qui a pour seul but d’investir (et non de produire) et dont le capital est variable, au gré des arrivants et partants.

Calcul de la valeur liquidative et limites

Le calcul de la VL est un acte de gestion très important, car il est déterminant pour garantir l’équité des participants. De nombreux points techniques sont à surveiller, dont certains dépassent le périmètre de cet article.

🚨 Mentionnons en quelques-uns :

  • Problèmes de date

La réglementation ou la notice d’un fonds doivent préciser clairement à quelle date les actifs du fonds sont inventoriés et évalués. Souvent, la VL du jour peut correspondre aux actifs de la veille en fin de journée. Parfois, ils correspondent à la situation de la fin de la journée même, auquel cas elle n’est pas connue durant la journée.
Dans ce cas les investisseurs entrent ou sortent à cours inconnus. Ils passent leurs ordres soit en donnant le montant investi, soit le nombre de parts souscrites.
Plus tard, quand la VL est publiée, l’investisseur connaît alors les détails de son ordre (montant ET nombre de parts).

  • Les frais non prélevés

Généralement les frais sont prélevés par le gérant en fin de mois. Si quelqu’un rentre en cours de mois, il faut s’assurer qu’il ne les paye qu’au prorata de sa présence dans le fonds. Si quelqu’un sort en cours de mois, il faut s’assurer qu’il paye les frais pour le début du mois.
Cela se gère en incluant dans le calcul d’actif net, une provision pour les frais prélevés effectivement en fin de mois.

  • Frais d’entrée et de sortie

Certains fonds prélèvent des frais à l’entrée et/ou à la sortie du fonds. C’est une des modalités de rémunération du gérant. Cela correspond également aux problèmes de liquidité : quand on vend ou achète des actifs en quantité importante, on ne reste pas exactement au prix du marché. On achète généralement un peu plus haut, et l’on vend un peu plus bas. Une partie des frais d’entrée/sortie permettent de tenir compte de cette réalité.
Tous ces frais se traduisent par l’existence de deux VL. La VL d’entrée, payée par les nouveaux entrants, est plus élevée que la VL théorique. La VL de sortie, payée par les sortants, est plus basse.

  • Problèmes d’arrondis

Le nombre de parts ainsi que le prix de la part ont un nombre de décimales limité. Les règles d’arrondi doivent être claires et documentées pour éviter les contestations.

  • Fonds multiparts

Certains fonds possèdent plusieurs types de parts. Cela permet de gérer des clientèles différentes qui peuvent avoir des frais différents, des montants minimaux différents, des devises différentes.
Il y a alors des VL différentes pour chaque type de parts. Il faut alors être capable de répartir équitablement les actifs nets globaux sur chaque type de part.

Malgré toutes ces précautions, l’arrivée ou le départ d’investisseurs peuvent provoquer des cas ou l’équité des porteurs de part est difficile voire impossible à respecter.
Un exemple d’actualité est celui du départ massif des clients de hedge funds. Ces fonds possèdent des actifs difficiles à vendre rapidement, ou dont la vente en volume ferait baisser le prix de façon significative (actifs peu liquides).
Quand avec la crise, les clients ont retiré massivement leurs capitaux de certains fonds, les gérants ont du liquider des actifs. Pour éviter d’avoir des prix de vente trop bas, ils ont préféré vendre les actifs les plus liquides.
En conséquence, les clients restants, les plus fidèles, seront lésés si à leur tour ils décident de vendre, car les actifs restants sont moins liquides.
Pour limiter ces effets, les hedge funds interdisent les mouvements fréquents, et demandent d’être notifiés à l’avance de ces mouvements.

Rôle éthique de la VL

Comme expliqué, le passage par la VL est un outil pratique et indispensable pour permettre de communiquer l’état des performances d’un fond mutualisé à un grand nombre d’investisseurs ne se connaissant pas.

Une erreur sur le calcul de la VL induit mécaniquement une injustice. Reprenons le tableau de l’exemple 2.

Actif net au 1/10/08Part de A à la finPart de B à la finPerfo. les 9 premiers moisPerfo. les 3 derniers moisPerfo. totale du fondsPerfo. de APerfo. de B
9001024,142275,86-10%13,793%2,414%2,414%13,793%
1000110022000%10%10%10%10%
10501136,072163,935%8,197%13,607%13,607%8,197%
11001170,972129,0310%6,452%17,097%17,097%6,452%
13001300200030%0%30%30%0%
14001358,821941,1840%-2,941%35,882%35,882%-2,941%

Supposons que la vraie VL (correspondant aux actifs effectifs du fonds) soit de 1100€, on voit qu’en communiquant une VL artificiellement élevée, le gérant favorise les nouveaux entrants au détriment des anciens.
À la limite en communiquant une VL de 1300€ le 1/10, toute la performance annuelle du fonds est portée les 9 premiers mois, et B fait une performance nulle.
Inversement, en communiquant une VL de 1000€ le 1/10, toute la performance du fonds est portée dans les 3 derniers mois. A et B font la même performance.

Il est également important de publier la VL en temps et en heure. En effet, dans l’exemple ci-dessus, si le gérant publiait la VL du 1/10 en fin d’année, il pourrait, connaissant la performance globale du fond, la répartir à son gré entre A et B.

L’exemple Madoff

Il est tout à fait possible de lire l’affaire Madoff en termes de VL faussée4.

Madoff a annoncé en permanence à ses investisseurs des gains fictifs. Il se trouve dans la situation de la dernière ligne du tableau, où les premiers investisseurs gagnent des performances démesurées par rapport à la réalité, quand les derniers investisseurs perdent leur argent sans le savoir.

Si l’on ajoutait à ce tableau les sorties de fonds étalées dans le temps, on s’apercevrait bien vite que les derniers sortants n’auraient quasiment plus d’actifs réels à se partager. C’est ce qui est arrivé fin 2008, quand les clients de Madoff ont retiré leur argent, à des VL artificiellement élevées. Un jour Madoff constatant qu’il ne restait rien dans les caisses a dû dévoiler le pot-aux-roses.

Pour éviter ce phénomène, il est important que l’évaluation de la VL des fonds se fasse sur la base d’acteurs indépendants : le dépositaire, garant de l’inventaire des actifs, et le valorisateur qui évalue leur prix de façon indépendante. Cela constitue une garantie d’équité pour les différents investisseurs d’un même fonds.
➡️ Madoff jouait le rôle de gérant, de dépositaire, de valorisateur et de courtier. Ce qui lui a permis de mentir à tout le monde en limitant les possibilités de contrôles.

Annotations

1On néglige dans ce calcul tous les frais qui résulteraient de la vente et le rachat (fictifs) des actifs : frais de transactions, impact de la liquidité.

2Le nombre de parts n’est pas forcément entier, mais pour un fonds donné, il y a un nombre de décimales maximal pour le nombre de parts. En réalité, il y aura donc un arrondi, et C payera un petit peu moins de 5000€.

3En négligeant les frais de transaction et la liquidité.

4L’auteur de ces lignes ignore si la structure juridique des fonds Madoff l’obligeait à publier une VL. De toute manière, même s’il le faisait, les critères d’indépendance et de contrôle font que rien ne le contraignait à en publier une correcte.