Qu’est-ce qu’une politique d’austérité ? 

Une politique d’austérité est une politique économique qui vise à atteindre l’équilibre budgétaire à l’aide de réductions des dépenses publiques et d’augmentations d’impôts. 

Les politiques d’austérité, qui s’opposent aux politiques keynésiennes, ont souvent été appliquées ces dernières années face à la crise des dettes souveraines et leur efficacité provoque de vifs débats en sciences économiques. 

Pourquoi mettre en place des politiques d’austérité ?

Un État doit assumer un grand nombre de services publics sur le territoire qu’il administre. Or, toutes ces interventions ont un coût. Si l’État a des revenus (en majorité issus des impôts), il n’est pas rare que le montant de ses dépenses dépasse le montant de ses revenus et que celui-ci soit en situation de déficit budgétaire.

L’État doit donc gérer un budget ; comme vous et moi. En cas de déficit budgétaire, un État doit trouver des fonds, ce qu’il fait généralement en s’endettant. L’État français, par exemple, émet chaque année plusieurs milliards d’euros d’obligations sous forme de bons du Trésor ou d’OAT qu’il devra rembourser à court ou long terme.

De part sa capacité à lever des impôts, un État peut normalement s’endetter sans trop de difficultés. Mais les problèmes arrivent lorsque cet endettement devient trop important. Une dette trop importante peut ne plus être soutenable ; raison pour laquelle le niveau d’endettement est très suivi, notamment rapporté au Produit Intérieur Brut (PIB).

Si des prêteurs jugent qu’un État peut ne pas rembourser sa dette alors ils imposeront un taux d’intérêt plus élevé pour compenser ce risque, ou pire, ils refuseront de le lui prêter.

➡️ Dans ces conditions il y a peu d’alternatives : il est souvent nécessaire de mettre en oeuvre une politique d’austérité !

Selon la théorie quantitative de la monnaie, plusieurs économistes pensent que la création monétaire (ce qui pourrait être vue comme l’inverse d’une politique d’austérité) entraîne mécaniquement une hausse de l’inflation, sans impact positif sur la production.

Comment l’État peut-il gérer son endettement ? 

Pour réduire son déficit public et son niveau d’endettement, un État peut actionner trois leviers :

  • L’inflation : une politique monétaire laxiste sera inflationniste, ce qui augmentera les recettes de l’État. En effet, le montant d’un impôt est souvent proportionnel aux prix (comme la TVA) ou aux salaires (comme l’impôt sur le revenu). Donc, en cas d’inflation les recettes de l’État augmentent. Mais tout le monde n’est pas également impacté par cet impôt déguisé : cela profite aux créditeurs au détriment des épargnants.
  • Le défaut de paiement : c’est le pire cas de figure. Le défaut de paiement, c’est le fait de ne plus pouvoir payer ce que l’on doit à ses créanciers. En cas de défaut de paiement, plus personne ne voudra financer l’État et celui-ci ne peut tout simplement plus assurer certaines de ses missions. Il ne peut alors obtenir des fonds qu’auprès de certaines institutions internationales (le FMI par exemple) en échange de la mise en place de politiques structurelles et perd donc une partie de sa souveraineté économique, ce qui explique pourquoi cette situation est souvent la pire.
  • L’action sur le solde budgétaire : c’est là que rentrent en jeu les politiques d’austérité. On cherche à rééquilibrer le budget par une réduction des dépenses publiques combinées à une augmentation des impôts.

Les politiques d’austérité et le débat sur le rôle de l’État

Les politiques d'austérité

Les politiques d’austérité posent la question du rôle de l’État : elle acte un recul de ses investissements et de son périmètre d’intervention ou, au contraire, une augmentation de l’impôt. Et le débat est loin d’être clos.

D’un côté, le Britannique Keynes considère les investissements de l’État comme essentiels pour atteindre le plein emploi. Keynes part de la demande :

  • les entreprises ajustent leur production en fonction de la demande ;
  • les embauches dépendent de l’objectif de production ;
  • et, l’État en soutenant la demande permet d’atteindre le plein-emploi.

Un mécanisme essentiel apparaît dans l’approche de Keynes : le multiplicateur keynésien. En bref, les investissements de l’État circulent dans l’économie, et finissent par entraîner une augmentation du PIB supérieure à leur montant. Prenons un exemple concret: si l’État vous verse une aide de 100 euros. Vous décidez de la consommer, et vous dépensez ce montant  dans un restaurant. Le restaurateur paie des impôts sur ces revenus ( voilà l’investissement de l’État déjà en partie remboursé ! ), et s’en servira pour se payer lui-même et consommer, l’aider à payer un salaire, en rémunérant ses fournisseurs, ou encore en investissant. Dans tous les cas, cette dépense générera encore des revenus pour l’État et pour un autre agent économique, qui lui-même pourra le réinvestir, et ainsi de suite. Finalement, l’État a récupéré une partie de son aide, et le PIB a augmenté de plus de cent euros. Selon cette théorie, une politique d’austérité a tout faux. l’État réduit de manière importante l’activité économique et par la même occasion ses revenus, ce qui rend de nouvelles coupes budgétaires nécessaires ; bref, un échec. 

L’américain Friedman, a l’inverse, prône un désengagement de l’État de l’économie. Selon lui, si l’État investit plus qu’il ne le peut, les agents vont simplement épargner en prévision de futures hausses d’impôts. Si on reprend l’exemple précédent, si l’État vous donne 100 euros et que vous les épargnez, l’économie et l’État n’y gagnent rien ! 

Friedman souligne aussi le fait que l’émission d’obligations par l’État fait augmenter l’offre sur le marché des obligations, ce qui fait augmenter les taux d’intérêts pour tous les agents économiques. L’argent investi par l’État est donc un argent qui ne sera pas investi par des entreprises, pourtant plus efficaces. L’État doit donc se désengager de l’économie et rechercher l’économie budgétaire, ce qui justifie la mise en place de politiques d’austérité. 

L’inconvénient des politiques d’austérité 

Nous avons esquissé dans l’explication du débat entre Keynes et Friedman les défauts des politiques d’austérité. On en compte deux principaux :

  • Comme le montre Keynes, à court terme, l’activité économique est réduite, tout comme les revenus de l’État. Certains services publics peuvent alors malheureusement perdre en qualité.
  • Leur efficacité dépend essentiellement du timing de leur mise en place et de leur intensité : les périodes de sorties de crise sont peu adaptées à ces politiques puisque ces dernières auront alors un effet procyclique. Cependant, réduire le déficit en période de croissance demande des mesures que les dirigeants n’ont pas intérêt à mettre en place. Des politiques d’austérité trop drastiques auront quant à elles des effets déflationnistes et récessionnistes importants. En d’autres termes, l’idéal est une gestion saine du budget qui ne créerait pas de dettes nécessitant la mise en place de politiques d’austérité. 

Deux exemples historiques 

Le tournant de la rigueur de Delors

Après son élection en 1981, François Mitterrand met en place un programme social ambitieux et très coûteux, qui dégrade l’équilibre budgétaire et augmente l’inflation. Le gouvernement doit agir et le fait  dès 1983 avec le “tournant de la rigueur” mené par le ministre de l’Économie Jacques Delors. Les cotisations sociales augmentent tandis que les salaires sont bloqués. Ce plan prévoyait 27 milliards de francs d’économies et 24 milliards de francs d’augmentation d’impôts. Le déficit passe de 3 % du PIB en 1983 à 2% en 1987. C’est un succès en demi-teinte: l’équilibre n’est pas atteint, et le chômage a augmenté. La déroute est néanmoins évitée.

La crise de la dette

Giórgos Papandréou, Premier ministre Grecque lors de l’éclatement de la crise de la dette grecque.

Fin 2009, plusieurs agences de notation financière dégradent la note de la Grèce qui se trouve alors endettée à 147% de son PIB. Très vite, les craintes s’intensifient et les taux d’intérêt grimpent, si bien que la Grèce n’a rapidement plus les moyens de se financer pour faire face à ses dépenses courantes

Le FMI et les pays membres de la zone euro sont obligés d’intervenir et ils imposent une politique d’austérité drastique. La Grèce ne sortira de la récession que 5 ans plus tard et la diminution constante de son PIB n’aide pas à réduire le poids de son endettement relatif ! Ces politiques d’austérité trop strictes et mises en place au mauvais moment, en plus d’avoir créé une situation sociale désastreuse, ont eu un effet contre-productif quant à la gestion de la dette du pays…