Délit d’initié – définition

Un délit d’initié consiste à utiliser une information confidentielle afin d’en tirer parti lors d’une opération de bourse.

Juridiquement, le délit d’initié fait référence à un délit financier commis par une personne dite « initiée ». Parmi les initiés, on en distingue deux types : 

  • les initiés primaires, qui sont des personnes dont la situation professionnelle leur permet d’obtenir directement des informations sensibles sur une entreprise (par exemple : un PDG, un membre du conseil d’administration, un liquidateur, etc.) 
  • les initiés secondaire, c’est-à-dire des personnes ayant obtenu par un moyen détourné une information sensible sur une entreprise (un proche d’un initié primaire, un employé subalterne ayant acquis l’information par erreur, etc.). 

⚠️ Utiliser une information d’initié à des fins d’enrichissement personnel peut être sévèrement puni. Les autorités financières surveillent d’ailleurs attentivement les opérations suspectes, par exemple des volumes d’échange important avant la publication officielle d’une nouvelle concernant une entreprise donnée

➡️ En France, un délit d’initié peut être puni de 5 ans d’emprisonnement et d’une amende allant jusqu’à 10 fois le montant des profits engendrés lors de l’opération. 

Ces sanctions sont en général nécessaires pour dissuader les initiés car le bénéfice d’un tel délit peut souvent être exceptionnel. Par exemple en 2008 le rachat d’une société par la Philadelphia Consolidated Holding Group, a fait bondir le cours de la société de 64%. Cet exemple n’est pas anodin car un particulier qui avait eu vent de l’information en avance à ainsi pu gagner 292 000 $ en achetant l’action à l’avance ! Il a cependant été, par la suite, arrêté et inculpé pour délit d’initié.

Les délits d’initiés, parfois légaux ?

Bien que la notion de délit d’initié encadre les opérations de trading des potentiels initiés, elle ne l’interdit pas. Le dirigeant d’une société, un cadre de la direction ou un membre du conseil d’administration peut effectuer acheter des actions à titre personnel.

Aux États-Unis, par exemple, un système déclaratif à été mis en place par la SEC (Securities and Exchange Commission) pour éviter les délits d’initiés.

Ainsi les personnes visées par la définition d’initié primaire sont dans l’obligation de consigner leurs opérations auprès du régulateur, qui se charge ensuite de vérifier que ces opérations n’ont pas été réalisées dans le but de s’enrichir au profit d’investisseurs non informés.

Ces déclarations sont d’ailleurs publiques et vous pouvez les consulter ici.

Comment réagir en possession d’information confidentielle ?

Tout d’abord, il est évident que vous ne devez sous aucun prétexte l’utiliser afin d’en tirer un bénéfice quelconque ! Et par bénéfice nous entendons ici non seulement les gains issus d’un potentiel d’investissement, le fait de vendre des actions déjà en votre possession afin d’éviter des pertes mais aussi le fait de « vendre » cette information.

Ensuite la situation diffère, selon le pays où vous vous trouvez : 

  • Aux États-Unis vous devez respecter l’interdiction ci-dessus et attendre que l’information soit rendue publique, sans la partager.
  • Toutefois, en Europe, les règles sont différentes. En effet, si vous détenez une information sensible, vous devez respecter à la fois l’interdiction mais aussi une obligation dite “positive”. Cette obligation consiste simplement en la divulgation de l’information :
    • dès que possible ;
    • de façon claire et précise ;
    • accessible à tout le monde ou, en tout cas, au plus grand nombre.

Quelques exemples de délits d’initiés célèbres

Affaire Enron

Eron, un délit d'initié hors-norme
Eron, un délit d’initié hors-norme

Enron a été, dans les années 90, une des plus grandes sociétés américaines dans le secteur de l’énergie ; puis a élargi ses activités en proposant aussi des produits dérivés sur le gaz et les énergies. En 2001, Jeffrey Skilling est nommé PDG de l’entreprise, poste où il ne reste que 6 mois.

En effet, cette entreprise prospère, vue comme un modèle de croissance et d’innovation aux Etats-Unis, a commencé à attirer l’attention des régulateurs en 2001. Ceux-ci se sont penchés sur la société, en remarquant que les comptes de l’entreprise étaient tenus de manière peu transparente.

Plusieurs enquêtes ont alors été lancées, révélant des montages financiers illégaux permettant à Enron d’annoncer des résultats très positifs alors que l’entreprise était en réalité extrêmement endettée. Suite à ces révélations, l’entreprise à déclaré faillite, faisant alors, à cette époque, la plus grande faillite de l’histoire. 

Cependant, l’histoire ne s’arrête pas là. Et pour cause, les autorités se sont interrogées sur le rôle et la responsabilité de Jeffrey Skilling. Ils ont alors découvert, qu’en plus d’être au courant de ces actes illégaux, le PDG avait vendu pour 200 millions de dollars d’action Enron, tout en incitant ses salariés à les acheter, les ruinant lors de la faillite. Jeffrey Skilling est alors jugé en 2006, pour délit d’initié, fraude, complot, et a été condamné à une peine de 24 années de prison !

Affaire Pechiney-Triangle

L'affaire Pechiney

Nous traversons maintenant l’Atlantique, pour une affaire française, mêlant à la fois délit d’initiés et scandale politique.

En 1988, une annonce vient secouer les marchés financiers français. La société Pechiney, spécialiste de l’aluminium et de la métallurgie alors détenue par l’État Français va racheter l’entreprise américaine Triangle, un fabriquant de boîtes de conserve. Cette opération d’envergure permettra à Picheney de doubler sa taille.

Cependant, quelques jours avant l’annonce, la SEC (les gendarmes de la bourse américaine) remarque une explosion du volume des échanges des actions Triangle, passant de 3 500 à 200 000 actions échangées par jour. Une enquête est alors menée, et celle-ci remonte jusqu’à plusieurs hommes politiques français et hommes d’affaires proches du gouvernement.

Le verdict est sans appel, plusieurs hommes politiques ont prévenu en avance ces hommes d’affaires de l’opération de rachat, leur permettant alors de réaliser d’importants bénéfices (environ 7,3 millions d’euros).

Ils sont finalement 9 à être inculpés pour délits d’initiés, dont l’ancien directeur de cabinet du ministre de l’Économie de l’époque, Alain Boublil.

Affaire Mathew Martoma

Mathew Martoma
Mathew Martoma

Nous allons maintenant vous présenter ce qui à été qualifié par le procureur new-yorkais Preet Bharara, spécialiste en délit d’initié, comme le “plus grand et le plus rocambolesque délit d’initié de l’histoire”.

Nous sommes en 2008, et Mathew Martoma est alors trader chez SAC Capital, un hedge fund connu pour ses pratiques à la limite de la légalité. A cette époque, SAC Capital détient une position de 700 millions de dollars sur les actions de deux groupes pharmaceutiques travaillant sur un médicament anti-alzheimer. 

Par l’intermédiaire de son médecin, Mathew Martoma apprend en avance que ce médicament n’a pas été accepté par la FDA, l’agence américaine autorisant la mise en vente des médicaments. Il décide alors de vendre toutes les actions jusqu’alors détenu par SAC et en profite même pour prendre des positions de vente à découvert sur ces deux groupes, lui permettant alors d’engranger 276 millions de dollars ! 

A cela, il faut aussi ajouter les pertes évitées par le fond  à l’annonce de la non approbation des médicaments. Le cours d’une des deux sociétés pharmaceutiques s’est effondré de 42% !

Cependant, les montants étaient trop importants pour être dissimulés et Mathew Martoma à été condamné à 9 années de prison pour son délit d’initié.

Heureusement, il n’est pas nécessaire de faire des délits d’initier pour s’enrichir en bourse. On en parle, par exemple, dans notre article : débuter en bourse !