Démembrement de propriété : principe, fonctionnement et fiscalité

Optimiser sa fiscalité ou réaliser un achat immobilier à moindre coût, c’est possible grâce au démembrement de propriété ! Opérant une division du droit de propriété entre deux personnes, ce montage juridique offre des avantages fiscaux en vente, donation et succession.

C’est quoi le démembrement de propriété ?

Les articles 578 et suivants du Code civil donne la définition du démembrement de propriété. Il consiste à séparer le droit de propriété entre deux personnes : l’usufruitier et le nu-propriétaire.

Le démembrement peut être effectué sur des biens immobiliers, on parlera alors de démembrement immobilier. Mais vous pouvez aussi le mettre en place sur des biens mobiliers (assurance vie, meubles…).

Formant un droit réel, c’est-à-dire portant sur une chose, le droit de propriété comporte trois attributs :

  • l’usus : c’est le droit d’utiliser ou droit d’usage et de jouissance du bien immobilier. Il vous permet ainsi d’habiter ou de louer le logement ;
  • le fructus : c’est le droit d’en tirer des fruits, autrement dit, d’en percevoir des revenus. Si par exemple, vous louez l’appartement ou la maison, les loyers que vous en tirez constituent les fruits ;
  • l’abusus : c’est le droit de disposer du logement. Vous pouvez le conserver, le modifier, le vendre…

Généralement, ces attributs appartiennent à une seule personne : le propriétaire, ou plein propriétaire. Dans le cadre du démembrement de propriété, le nu-propriétaire dispose de l’abusus (nue-propriété). L’usufruitier dispose de l’usus et du fructus, qui ensemble, forment l’usufruit.

La vente en viager repose elle aussi sur le démembrement de propriété. Mais à la différence de l’usufruitier, le vendeur en viager ne peut pas louer le logement. il peut seulement y résider, en vertu d’un droit d’usage et d’habitation.

D’où provient le démembrement de propriété ?

Il existe deux types de démembrement de propriété, de deux sources différentes :

  • Le démembrement légal, ou usufruit légal : il puise son origine dans un texte de loi. Un exemple ? L’usufruit successoral mis en place dans le cadre de la succession d’un défunt, qui laisse derrière lui des enfants et un conjoint survivant comme héritiers ;
  • Le démembrement conventionnel ou usufruit conventionnel : il procède d’une convention, c’est-à-dire d’un contrat. Il en existe deux sortes : l’usufruit à titre gratuit (par exemple, une donation avec réserve d’usufruit) et l’usufruit à titre onéreux (vente de la nue-propriété).

Comment fonctionne le démembrement de propriété ?

Le plus souvent, l’usufruit est viager. En d’autres termes, il perdure jusqu’au décès de l’usufruitier.

Parfois, vous pouvez souscrire à un usufruit temporaire, par exemple dans le cadre de l’achat en viager chez Perl. Vous achetez la nue-propriété d’un logement, et l’usufruit est confié à un bailleur social. L’extinction de l’usufruit intervient à l’issue d’une période définie par contrat, généralement comprise entre 15 et 20 ans.

A la fin de l’usufruit viager ou de l’usufruit temporaire, le nu-propriétaire récupère les attributs de l’usufruitier. On parle de remembrement pour désigner la reconstitution du droit de propriété entre les mains du nu-propriétaire. Le remembrement s’effectue sans formalités ni frais supplémentaires.

Usufruitier, nu-propriétaire : quels droits et obligations ?

Les droits et obligations de l’usufruitier

L’usufruitier ne peut pas changer la destination du bien. Par exemple, il ne peut pas transformer un logement à usage d’habitation en local commercial.

Il doit jouir du bien en bon père de famille, c’est-à-dire le conserver en bon état, sans nuire aux intérêts du nu-propriétaire. Ainsi, les réparations et l’entretien courant lui incombent-ils.

L’usufruitier ne peut pas réclamer d’indemnité s’il procède à des améliorations sur le bien.

Les droits et obligations du nu-propriétaire

Les grosses dépenses et grosses réparations sont à la charge du nu-propriétaire. D’après le Code civil, entrent dans cette catégorie :

  • Les gros murs et les voûtes ;
  • Le rétablissement des poutres et des couvertures entières ;
  • Les digues, les murs de soutènement et les clôtures.

Quelle est la fiscalité du démembrement de propriété ?

La fiscalité de l’usufruitier et la fiscalité du nu-propriétaire ne reposent évidemment pas sur la valeur en pleine propriété du bien, mais sur les droits démembrés de chacun. Le Code général des impôts (CGI) prévoit un barème de l’usufruit viager et un barème de l’usufruit temporaire.

Le barème fiscal de l’usufruit viager

La valeur de l’usufruit et la valeur de la nue-propriété dépendent de l’âge de l’usufruitier au moment de la transaction immobilière, qu’elle intervienne à titre onéreux (vente) ou à titre gratuit (donation ou succession).

Âge du donateurValeur usufruitValeur nue-propriété
moins de 21 ans90 %10 %
de 21 à 30 ans80 %20 %
de 31 à 40 ans70 %30 %
de 41 à 50 ans60 %40 %
de 51 à 60 ans50 %50 %
de 61 à 70 ans40 %60 %
de 71 à 80 ans30 %70 %
de 81 à 90 ans20 %80 %
plus de 91 ans10 %90 %
Barème fiscal de l’usufruit et de la nue-propriété

Le barème fiscal de l’usufruit temporaire

Le barème de l’usufruit temporaire fonctionne par tranches. La valeur de l’usufruit est estimée à 23 % de la valeur réelle du bien, par tranche de 10 ans non fractionnables.

La valeur d’un usufruit de 15 ans, par exemple, est de 46 % de la valeur vénale du bien.

Les impôts locaux et taxes 

C’est normalement l’usufruitier qui paient les impôts locaux (taxe d’habitation et taxe foncière). Toutefois la convention peut en disposer autrement, en mettant la taxe foncière à la charge du nu-propriétaire.

La taxe sur la plus-value

À moins que le bien vendu en nue-propriété constitue la résidence principale du vendeur, celui-ci devra s’acquitter de la taxe sur les plus-values immobilières, au régime des particuliers.

Une fois la plus-value déterminée, en fonction de la valeur en usufruit, l’usufruitier paiera de l’impôt sur le revenu au taux de 19 % et des prélèvements sociaux au taux forfaitaires de 17.2%, avec des abattements éventuels pour durée de détention.

L’impôt sur la fortune immobilière (IFI)

Dès lors que la valeur nette de votre patrimoine immobilier excède 1.3 million d’euros, vous êtes redevable de l’IFI. En principe, d’après le CGI, c’est l’usufruitier qui paie l’IFI, non pas sur son droit démembré, mais sur la valeur en pleine propriété du bien.

Toutefois, dès lors que l’usufruit est consenti à un tiers ou procède de la loi, l’IFI est partagé entre usufruitier et nu-propriétaire, en fonction du barème fiscal viager.

Les frais de notaire en démembrement de propriété

C’est le nu-propriétaire qui supporte les droits de mutation à titre onéreux. Ils sont calculés à partir du barème de l’usufruit viager, et représentent 7 à 8 % du montant de l’acquisition dans l’ancien, 2 à 3 % pour un achat immobilier dans le neuf.

Les droits de succession et les droits de donation

Tous deux entrent dans la catégorie des droits de mutation à titre gratuit. Après application d’un abattement pour lien de parenté, les droits de succession ou de donation sont calculés à partir du barème de la nue-propriété et de l’usufruit.

Quels sont les avantages du démembrement immobilier ?

Le démembrement de propriété offrent des avantages fiscaux notamment en donation et succession. Il permet également de s’offrir un bien immobilier à un prix décoté.

Un achat immobilier à moindre coût

Le prix de cession du bien immobilier est calculé sur la base du barème de la nue-propriété. Par exemple, si vous achetez la nue-propriété à un vendeur âgé de 70 ans, vous paierez seulement 60 % de sa valeur en pleine propriété.

Comme vous ne pouvez pas louer le bien, ce droit appartenant à l’usufruitier, vous ne serez pas fiscalisé au titre de recettes locatives. Et vous ne vous préoccupez pas de la gestion locative !

L’optimisation de la transmission du patrimoine

Le démembrement de propriété permet aussi de faire de l’optimisation fiscale sur la succession. Le mécanisme qui permet de transmettre le patrimoine à un coût allégé, ou sans fiscalisation, s’appelle la donation en démembrement de propriété.

Les parents (donateurs) donnent la nue-propriété aux enfants (donataires) et se réservent l’usufruit. Au moment de la donation, les héritiers profitent d’un abattement de 100 000 euros (par parent, et par enfant). Au décès des parents, les héritiers deviennent pleins propriétaires, sans droit de succession supplémentaires.

Exemple

En couple, à 50 ans, vous donnez la nue-propriété d’un bien estimé à 300 000 euros à votre enfant.

Valeur de la nue-propriété : 40 %, soit 120 000 euros.

Abattement de 100 000 euros x 2 parents = 200 000 euros

L’enfant n’est pas fiscalisé sur la donation.

Vous pouvez aussi donner un coup de pouce financier à un enfant grâce à la donation temporaire d’usufruit. Votre enfant dispose du droit de se loger ou de louer le bien pendant une durée définie par contrat.

La réduction de l’impôt sur la fortune immobilière

On l’a vu précédemment, l’IFI est partagé entre usufruitier et nu-propriétaire. Si vous êtes déjà assujetti à l’IFI ou sur le point de l’être, vous pouvez procéder à la vente en démembrement de propriété pour réduire votre impôt.

Questions fréquentes

Qu’est-ce que le démembrement de propriété ?

Le démembrement de propriété est un montage juridique consistant à séparer les attributs du droit de propriété entre deux personnes. L’usufruitier dispose de l’usufruit : il peut occuper ou louer le logement. Le nu-propriétaire possède la nue-propriété : il peut vendre ou modifier le bien.

Démembrement de propriété et succession : quels avantages ?

Le démembrement permet d’optimiser la fiscalité de la succession. Les parents donnent la nue-propriété d’un bien aux enfants, en profitant de l’abattement de 100 000 euros rechargeable tous les 15 ans. Au décès des parents, les enfants deviennent pleinement propriétaires sans fiscalité supplémentaire.

Démembrement de propriété : quels frais de notaire ?

Seul le démembrement immobilier est payant et suppose le versement de frais de notaire. En moyenne, l’opération revient à 1500 euros.